C'est une très bonne nouvelle qui vient de tomber pour tous les joueurs de poker en ligne français et même européens et les opérateurs : Le projet de loi numérique définitivement adopté va enfin permettre le partage des liquidités, et autoriser de nouvelles variantes.
En France, la ratification d’une loi ressemble à un réel parcours du combattant : après une première et une seconde lecture faites par l’Assemblée Nationale et par le Sénat, après la finalisation d’une version commune (lorsque le premier texte voté par l'Assemblée est différent de celui voté par le Sénat) lors d’une commission mixte paritaire, c’est enfin le tour de la lecture définitive par les Députés, qui décident alors de l’adoption d’un texte, ou pas… Puis le Conseil Constitutionnel peut prononcer une éventuelle saisine à l'encontre du projet de loi. Si ce n’est pas le cas, c’est alors le Président de la République qui promulgue le texte et la loi entre en vigueur après sa publication au Journal Officiel (et éventuelle publication de décrets d'application).
Alors les joueurs de poker en ligne et opérateurs peuvent désormais crier victoire : le 28 septembre dernier, le Parlement avait définitivement adopté le projet de loi numérique, dans les tuyaux depuis le mois de mai. Quant à la publication au JO, c’est chose faite depuis le 8 octobre.
Ce texte consensuel contient des mesures en faveur des internautes et doit permettre « d’actualiser le logiciel » de la République, selon le gouvernement pour « s’adapter aux modifications rapides qui ont lieu dans l’univers du web et du high-tech ». Parmi les grandes lignes de la loi numérique, on trouve : le droit à l’oubli pour les mineurs, l’instauration d’un principe de non-discrimination pour garantir la neutralité du Net, un arsenal de sanctions pour la CNIL, une meilleure ouverture des données publiques, des dispositions pour accélérer la mise en place des réseaux numériques, etc.
« La plus grande mutation du marché du poker depuis son ouverture en 2010 »
Mais ce qui intéresse surtout les amateurs de poker en ligne, c’est la section 3 de ce texte et ses articles 95 à 100, entièrement consacrés à la régulation des jeux en ligne et qui permet d’envisager le partage des liquidités des opérateurs français (enfin, ceux qui restent) avec leurs homologues européens.
Pour résumer, comme le souligne Alexis Laipsker dans Le Point, ce texte va « probablement provoquer la plus grande mutation que le marché du poker ait connue depuis son ouverture en juin 2010. »
Et c’est vrai : l'industrie du poker en ligne et les joueurs militent depuis plusieurs années en faveur d'un décloisonnement, c’est-à-dire que les joueurs français pourront potentiellement (et cette fois officiellement) retrouver à leurs tables d’autres joueurs européens, sous réserve que les régulateurs des marchés concernés aient conclu une convention bilatérale avec le président de l'ARJEL (Autorité de Régulation des Jeux En Ligne en France).
Pour autant, tout n’est pas gagné puisqu’il subsiste quand même certains obstacles techniques et fiscaux, ne serait-ce que les différences concernant la collecte de la TVA ou l'assiette de la taxe entre les différents pays.
Sauver le poker français
Mais alors pourquoi ce partage est-il si crucial et plébiscité ? Selon des études menées par l’ARJEL, le marché du poker français, estimé à 350 millions de dollars en 2011 n’a cessé de décliner à cause des « barrières fiscales d’exploitation ». Les revenus annuels sont actuellement estimés à 280 millions de dollars, alors que la plupart des 85 pays du monde ayant légalisé le poker en ligne se situent en Europe et qu’en gros 40 % des revenus des jeux en ligne sont générés sur le Vieux Continent…
Un marché unifié pèserait donc plus du double que celui de la France seule. Les opérateurs de jeux espèrent ainsi enrayer la dégringolade des revenus en cash games (-33 % en 3 ans) et juguler la fuite des joueurs de poker sur des sites non réglementés, malgré la loi d’ouverture des jeux d’argent en ligne promulguée en 2010 : Il semblerait en effet que 23,5 % des joueurs français jouent toujours exclusivement sur des sites de poker non réglementés !
La France avec l'Italie et l'Espagne ?
A l’instar de PokerStars qui a déjà restructuré son organisation ou de Winamax qui recherche un « chargé de développement international pour le marché italien », les autres opérateurs devront maintenant trouver des accords avec leurs confrères étrangers ou faire des demandes de licence dans ces pays.
Mais au fait, quels sont les pays les plus susceptibles de partager leurs liquidités avec nous ?
Les deux favoris semblent être l’Italie et l’Espagne car le fonctionnement de leurs autorités de régulation respectives est assez proche du nôtre. Mais tout n’est pas encore gagné : En effet la situation politique compliquée en Espagne fait que la DGOJ (ARJEL espagnole) ne peut rien faire sans l'accord du gouvernement, or il n’y a pas de gouvernement. Quant à l’Italie, sa lenteur chronique pour les prises de décisions n’est un secret pour personne.
Si l'on ajoute les élections présidentielles en France qui auront lieu dans plus de 6 mois et qui risquent de ralentir les choses, les changements pourraient n'arriver que d'ici fin 2017 voire 2018. Il risque donc de falloir se montrer encore patient.
Quelles conséquences pour les joueurs ?
Au final, les vraies bonnes nouvelles sont surtout pour les joueurs, car les opérateurs pourront mieux rivaliser pour leur proposer des offres et des promotions plus alléchantes les unes que les autres afin de les attirer et de les fidéliser.
Par ailleurs, même si cela a moins fait la une, il faut noter que le Décret n° 2016-1326 du 6 octobre 2016 relatif aux catégories de jeux de cercle publié au JORF autorise à présent de nouvelles variantes de poker : Le 2-7 Triple Draw, le Stud, l'Omaha 5 et l'Omaha High/Low pourront désormais partie de l’offre officielle des salles de poker en ligne ! Au plus grand bonheur des nombreux joueurs qui réclamaient cela depuis des années.