L’Open-Face Chinese Poker est un jeu encore méconnu du grand public en France. Pourtant celui-ci est peu à peu en train de se faire sa place, et ceux qui y jouent déjà n'arrivent plus à en décrocher.
Les stars du poker international l'ont d’ores et déjà adopté et se livrent des batailles dont les enjeux sont assez hauts dès que l'occasion se présente. Le Chinese Poker est devenu LE divertissement pour les joueurs sur le circuit.
Cette nouvelle variante a ainsi désormais fait son bonhomme de chemin jusqu'aux salles de tournois de poker. Après le PCA 2013, les WSOP proposent également un event cet été afin de promouvoir le poker chinois.
Les stars se chargent de la Promo du Chinese Poker
Il suffit d'avoir lu les tweets de Daniel Negreanu, Phil Hellmuth ou Jason Mercier pour se rendre compte que ce jeu a déjà de vrais adeptes. Ce dernier raconte comment, lors de l'EPT San Remo, il a joué 34 heures d'affilée à l'Open-Face Chinese Poker, pour enchaîner avec une session de 20 heures le jour suivant. Daniel Negreanu écrit sur tweeter : « S'il existait une application Open Chinese Poker je serais prêt à payer 5 800 $ pour l'obtenir et j'y jouerais 8 heures par jour ! », et plus loin, « Ça fait longtemps que je n'avais plus été si accro à un jeu de cartes ! ».
Phil Hellmuth a quant à lui contribué à la promotion de ce jeu par ses pertes à Monte-Carlo lors d'un heads-up face à Phil Ivey, qui lui a couté plus de 500.000 $ !
Dans la série online « Life of Ivey », on peut voir Barry Greenstein et Phil Ivey se disputer une partie High Stakes de « Chinese » dans l'avion, à 2000 $ le point !
Mais beaucoup d'autres pointures du monde du poker actuel telles que Scott Seiver, Tom Schneider ou Robert Mizrachi alimentent elles aussi la fièvre autour de cette nouvelle variante sur les réseaux sociaux.
Les premiers tournois d'Open-Face Chinese Poker
Lors du PokerStars Caribbean Adventure 2013, le premier tournoi d'Open-Face de l'histoire a eu lieu sur le circuit pro international. Ce side-event avec un buy-in de 2150 $ fut remporté par le pro canadien Peter Jetten.
À l'EPT de Monte Carlo de cette année, un tournoi d'Open-Face à 2 150 euros a eu lieu, et ce n’est autre que Jason Mercier qui remporta la première place.
Le 13 juillet 2013, un tournoi d'OFCP à 5000 $ clôturera les WSOP. Il s’agira cependant d’un Event sans bracelet à la clé. Les organisateurs veulent d’abord tester si l'évènement aura du succès. Mais peut-être l'année prochaine un bracelet sera-t-il à décrocher en Open-Face Chinese Poker ?
« Nous sommes toujours à la recherche de nouvelles choses qui plaisent », déclarait Seth Palansky le vice-président de la communication d'entreprise des WSOP dans une interview pour pocketfives « Nous voulons changer avec le temps et nous avons senti que cet évènement pourrait être populaire. »
Quelles sont les règles de l'Open-Face Chinese Poker ?
Les parties se jouent de 2 à 4 joueurs. Le but est de constituer 3 mains de poker avec 13 cartes :
1) Une main à 5 cartes sur la rangée du bas. Cette main doit être la plus forte parmi les trois. Par exemple une « couleur ».
2) Une autre main à 5 cartes sur la rangée du milieu, mais plus faible que celle du bas. Par exemple un « brelan ».
3) Une main à 3 cartes sur la rangée du haut, devant être la plus faible, (couleur et suite ne comptent pas). Par exemple « une paire ».
Au début de chaque tour, chaque joueur reçoit d'abord 5 cartes qu'il peut répartir comme il le souhaite sur l'une des trois rangées :
« back » - Rangée du bas avec la main la plus forte (5 cartes).
« middle » - Rangée du milieu avec la main intermédiaire (5 cartes).
« top » - Rangée du haut avec la main la plus faible des trois (3 cartes).
Par la suite, chaque joueur reçoit les cartes une à une, en commençant par le joueur à gauche du bouton, jusqu'à que 13 cartes soient distribuées à chaque joueur. Si la main du milieu est plus forte que celle du bas, ou si la main du haut est plus forte que celle du milieu, il s’agit d’un « foul » et le joueur n'est pas qualifié.
Le but est de constituer les mains les plus fortes, d'accumuler le maximum de « royalties », et ce, sans faire de « foul ».
Le système de « royalties » le plus répandu est le suivant :
Pour la main du bas (la plus forte), on compte 20 points pour la royal flush, 10 points pour la straight-flush, 8 points pour le carré, 6 points pour tous les full house, 4 points pour une couleur, et 2 points pour une suite. Si l'une de ces mains s’est constituée sur la rangée du milieu, les « royalties » sont doublées. Sur la rangée du haut, les joueurs reçoivent 1 point pour toutes les paires supérieures à la paire de 5, jusqu'à 9 points pour la paire d'As.
- Si un joueur « foul », donc ne se qualifie pas, il perd 6 points à chaque adversaire qualifié en plus des « royalties ».
- Le joueur gagne 1 point de chaque adversaire qu'il a battu (pour battre un joueur il faut avoir sur les trois rangées « back », « middle » et « top », 2 meilleures mains que l'adversaire).
- Les « royalties » d'un joueur ne comptent que s'il s'est qualifié et n'a pas sauté. Ses « royalties » comptent même si un autre joueur a des « royalties » plus hautes.
Dans les parties de Cash Game, les joueurs se mettent d'accord au préalable sur la hauteur des « royalties », et les possibilités sont nombreuses. Mais ce qui est certain, c'est qu'elles relèvent l'intensité et le niveau stratégique du jeu.
À première vue, l'Open-Face Chinese Poker peut sembler difficile à comprendre, alors qu'en réalité après une ou deux parties tout est clair et très intuitif !
(vous pouvez retrouver d'autres explications sur notre page des Règles du Chinese Poker).
Pourquoi un tel engouement ?
Les raisons pour lesquelles les joueurs de poker adorent cette variante sont nombreuses. L'une des raisons est certainement sa grande différence avec les autres variantes : il n’y a pas de mises.
« C'est un jeu relaxant », écrit ainsi Jason Mercier sur le blog Pokerstars, « Quand tu joues à un jeu auquel tu dois tout le temps décider combien miser, il y a beaucoup plus de pression. Pour ce jeu, il n'y a pas de pression car il n’y a pas de mises – mais il y a quand même énormément de décisions stratégiques à faire durant la main ! On peut faire tellement de choix différents qui vont changer le déroulement d'une main… »
Ce qui rend également ce jeu attractif pour beaucoup de gens qui s'intéressent de près ou de loin aux jeux de casinos, est qu'il est nouveau qu'il n'y a pas encore de stratégie fondamentale.Le Chinese Poker arrive aussi en ligne et sur les smartphones.
On ne peut en effet trouver d'ouvrages sur les mathématiques de l’Open Face Chinese Poker car personne ne les a encore résolues. Si les manières de jouer se sont standardisées dans les variantes les plus populaires, à l'Open-Face Chinese Poker chacun peut jouer à sa manière, sans avoir peur de faire un move non conventionnel.
Il n'y a pas non plus de poker tracker et pas d'outils pour prouver noir sur blanc qui est le meilleur joueur, et certains moves risqués peuvent même rapporter plus de 30 points à un joueur en un seul tour.
Beaucoup de facteurs rendent donc ce jeu très intéressant.
Depuis peu, une application Open-Face Chinese Poker est disponible pour 3,99 $. Plutôt bien réalisée, celle-ci est parfaite pour découvrir et s'entrainer sur cette variante, seul, face à l'ordinateur ou contre des amis.
Pour tous les joueurs de poker sérieux, commencer à s'intéresser au Chinese Poker devient ainsi presque de rigueur, le jeu étant sur la voie de trouver de plus en plus d'adeptes (dont son lot de débutants), avec le nombre de tournois risquant d'augmenter tout comme leur prizepool, très prochainement.
C.B
Todd Brunson : « Le poker chinois ouvert est le cancer du poker »
Si le poker chinois existe depuis déjà une dizaine d’années, ce n'est que récemment que sa popularité a explosé. Et que ce soit pour quelques centimes ou des centaines de dollars le point, il se joue partout : autour de la table du salon, sur mobile et au casino.
par Allen Rash - réactions recueillies en août 2014
Mais l'Open-Face Chinese Poker a-t-il vraiment sa place dans les salles de poker (les WSOP ont même organisé un tournoi sans bracelet en 2013) ? Nous en avons récemment parlé avec Todd Brunson, Paul Volpe et Shaun Deeb.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que Todd Brunson a un avis tranché :
“Le poker chinois ouvert, c’est le cancer du poker. Ce n’est même pas du poker. On ne joue pas au gin dans les salles de poker, je ne vois pas pourquoi on y jouerait au poker chinois.”
“Le poker, c’est regarder sa main, et miser” ajoute t-il.
Et pourtant les clients des casinos sont bel et bien demandeurs, qu'il s'agisse d'une “vraie” variante du poker ou pas.
“C’est pas parce qu’ils veulent y jouer qu’on devrait l’autoriser” répond Brunson. “Les salles de poker sont faites pour le poker. Pas pour le gin, pas pour le backgammon, parce que ce n’est juste pas du poker.”
Paul Volpe : “Pourquoi ne pas laisser les joueurs faire ce qu’ils veulent ?”
Mais tout le monde n’est pas d’accord avec Brunson.
Paul Volpe, joueur pro originaire du New Jersey, était l’un des premiers à promouvoir le poker chinois et y joue très souvent, que ce soit en ligne ou en live.
En Europe ou à Vegas, il y a joué partout et ne voit aucun problème à ce que les casinos s’ouvrent au poker chinois.
“Évidemment que j’y suis favorable. Si c’est régulé, s’il y a des règles fixes et harmonisées, je ne vois pas pourquoi on ne laisserait pas les joueurs faire ce qu’ils veulent.”
Il y a un point sur lequel il est d’accord avec Brunson cependant : le poker chinois est en train de modifier le monde des cash games high stakes.
“Surtout en dehors de Vegas,” explique-t-il. “Les parties de poker chinois en Europe ou au PokerStars Caribbean Adventure diminuent l’influx d’argent des autres grosses parties live.”
Et pour certains joueurs, le poker chinois vire même à l’obsession.
Shaun Deeb : “Le poker chinois va durer”
Légende du poker online, Shaun Deeb fait partie des grands fans du poker chinois et se montre plutôt d’accord avec Volpe, même s’il comprend le point de vue de Brunson.
A propos de l’argument selon lequel le poker chinois ouvert ne serait pas du poker par exemple : “Je suis assez d’accord” reconnaît Deeb.Shaun Deeb a remporté l'épreuve de Chinese Poker cette année au PCA.
“C’est beaucoup plus proche du blackjack que du poker donc je comprends cet argument. Mais dans les faits, il y a une hiérarchie des mains, beaucoup d’action, des mises… Pendant des années, ils ont joué au poker chinois (fermé) alors que c’était beaucoup plus confidentiel. Tous les spécialistes du mix-game, tous les grands joueurs ont joué au poker chinois. Le poker chinois ouvert en est tout simplement une variante.
C’est comme si on disait : “Tout le monde joue au Hold’Em maintenant, donc vous n’avez plus le droit de jouer au Pineapple.” Les jeux évoluent, ils se complexifient et deviennent plus intéressants, et les comportements changent aussi.
On est passé du Limit Hold’Em au No-Limit Hold’Em, et maintenant la plupart des grosses parties sont en Pot-Limit Omaha. Il y a toujours des tendances. C’est pareil pour le poker chinois.
Je pense que le poker chinois va durer. Les gens adorent ça. Il y a beaucoup de fish. C’est spectaculaire.
Je le dis depuis le début : le truc avec le poker chinois ouvert, c’est que n’importe qui peut arriver, regarder la partie et comprendre comment jouer. Il peut voir toutes les décisions prises par les joueurs.”