Un de ces beaux jours si vous en avez l'occasion, rendez-vous au Bellagio à Las Vegas. Vous aurez peut-être la chance d'y croiser quelques-uns des meilleurs joueurs du monde dans le « Big Game », dont Doyle Brunson, Jennifer Harman, Barry Greenstein et bien d'autres encore. Et parmi eux, vous pourrez même peut-être reconnaître l'une des premières superstars du poker, Johnny Chan.
Jouer à pile ou face sur des milliers et parfois même des centaines de milliers de dollars n'est rien pour Chan. L'homme a fait plus de 8,5 millions de $ de gains de tournois, en plus de l'argent qu'il a engrangé dans les parties de cash game.
Mais comme la plupart des joueurs de poker, Chan a dû travailler pour atteindre ce stade. Et en tant qu'immigrant chinois, la vie n'a pas toujours été facile pour lui. Le poker n'était pas en plus une voie que sa famille voulait lui voir prendre.
Chan a grandi dans un environnement modeste à Canton en Chine, jusqu'à l'âge de six ans au moment où sa famille immigre à Hong-Kong. Quatre ans plus tard, tout le monde fit le grand saut, vers l'Amérique. La famille Chan s'installe d'abord à Phoenix, puis à Houston où elle se lance dans les affaires, celles d'un restaurant.
Chan ne parlait pas beaucoup anglais lorsqu'il arriva pour la première fois aux Etats-Unis, ce qu'il essaya d'améliorer à l'école et au contact de la culture américaine. L'un des passe-temps locaux auquel il s'adonna assez vite fut le bowling. Lorsqu'il n'aidait pas au restaurant familial, Johnny faisait parler la poudre du côté de la salle de bowling, enchaînant strike sur strike.
Ironie du sort, c'est à cet endroit que Chan découvre le poker, qui devient vite sa vraie passion. Il commence à jouer dans des parties entre amis pour quelques centimes, qui se transforment vite en plus grosses parties au moment de rejoindre celle clandestine du restaurant familial. Mais à partir du moment où il commença à gagner trop, trop souvent, il fut banni de la partie.
A 16 ans Chan décide de tenter sa chance aux tables de cartes de Vegas. Il prit 500$ et s'assis illégalement à une table de poker, pour les transformer en 20 000 $ en une nuit. Mais il reperd tout la nuit d'après, dans ce qui allait devenir une habitude durant les débuts de sa carrière.
Au lieu d'embrasser immédiatement une carrière de joueur de poker, Chan se rend finalement au lycée à Houston, et y étudie le management de l'hôtellerie et de la restauration dans l'idée d'un jour prendre la relève de l'affaire familiale.
Le virus du poker restait toutefois bien ancré, et à 21 ans il quitta bien vite l'école pour repartir à Vegas.
Avec des hauts et des bas lors de ses premières années. Chan connait des périodes où il doit trouver un travail temporaire ou vendre ses biens pour continuer. Mais l'homme était empli de détermination à frapper fort dans le monde du poker. Doyle Brunson dit une fois à propos de ce « gamin à tête brûlée » qu'il avait le talent, mais qu' « il ne savait pas quand garder son tempérament sous contrôle ou quand arrêter de jouer. »
Une chose que Chan avait pour lui - en plus de son talent - , était son origine asiatique. Il se retrouva à Vegas durant une période où il y avait encore peu de joueurs asiatiques essayant de réussir dans le poker. Chan dit d'ailleurs que les gens le sous-estimaient et suivaient parfois une mise rien que pour savoir ce qu'il avait, ne le voyant pas comme l'un de ces grands joueurs.
En 1982, quelque chose s'enclenche pour Chan. Il abandonne son smoking tiré aux quatre épingles, commence à faire du sport et à manger sain, et son jeu commence à s'améliorer. C'est l'année où il s'inscrit à l'America's Cup of Poker de Las Vegas et gagne le surnom de « L'Orient Express » de la part de Bob Stupak, après avoir mis K-O 13 joueurs sur 16 en un peu plus de 30 minutes.
Chan s'en alla gagner le tournoi, et a depuis remporté un nombre record de 10 bracelets WSOP (World Series of Poker), dont deux consécutifs dans les Main Event de 87 et 88. Il aurait même réussi une série de trois victoires consécutives avec le Main Event en 1989 si l'affaire ne s'était finalement pas réglée en faveur du nouveau venu Phil Hellmuth. Chan accusait ce jour-là la fatigue et sur-joua sa main finale, un A-7, pour finir en seconde place.
En 2002, Chan eut la chance de prendre sa revanche contre Hellmuth. Le duel final de l'épreuve de No-Limit Hold'em à 2500$ des WSOP opposa à nouveau les deux hommes, cette fois pour voir Chan remporter son septième bracelet.
Ses victoires en WSOP ont également rendu célèbre sa marque de fabrique de l'« orange ». Chan aimait en effet apporter une orange à la table de poker, en guise de rafraîchisseur d'ambiance à une époque où fumer était toujours permis dans les casinos. Depuis que la réglementation a changé, l'orange est passée du statut d'accessoire pratique à celui de gri-gri que Chan a toujours avec lui à la table durant les tournois.
Chan était l'un des joueurs les plus connus à cette époque, et est aujourd'hui toujours considéré comme l'un des joueurs les plus complets au poker ; ses victoires en tournois ne le sont en effet pas qu'en épreuves de Texas Hold'em, mais également d'Omaha et de Draw.
Un événement aida Johnny à le propulser même encore plus loin sous le feu des projecteurs : le film Rounders (Les Joueurs), dans lequel il fait une apparition (cameo) et où tournent des séquences de sa victoire du Main Event des WSOP 1988 face à Erik Seidel.
Chan a été introduit au Poker Hall of Fame en 2002 et continue de poser son empreinte dans le monde du poker. Il a notamment concouru dans le tournoi Poker Superstars Invitational à Las Vegas, a été le mentor du controversé champion WSOP 2006 Jamie Gold, Series où il réussit une nouvelle table finale, prouvant qu'il était toujours une menace pour un autre bracelet, voire plus.
Encore récemment Chan a enregistré quelques jolies performances sur le circuit live, avec quelques places payées de plus dans les World Series dont une 156ème place dans le Main Event 2010 (sur plus de 7000 joueurs), et une 2ème place dans le tournoi High Roller de l'APPT Macau.
D'après son site Internet, le but ultime de Chan est d'ouvrir un casino pour pouvoir le diriger. L'homme a déjà prouvé qu'il avait l'énergie pour faire tout ce qu'il pouvait décider de faire, alors peut-être que des gens se dirigeront un jour au "Big Orange Hotel and Casino" de Las Vegas pour voir certains des plus grands joueurs du monde dans le Johnny Chan Poker Invitational, qui sait ?
Divers et anecdotes
* Surnom : "The Orient Express"
* A remporté 10 bracelets en or des WSOP
* Introduit dans le Poker Hall of Fame en 2002
* S'assoit toujours avec une « orange porte-chance »
* Porte une bague en diamants en forme de serpent
* Marié et père de six enfants, avec six maisons