Gaëlle Baumann a enflammé le Main Event des WSOP 2012, et réalisé une performance exceptionnelle en terminant 10ème. Mais qui est vraiment la jeune femme ? Revivez le parcours de celle qui s'inscrit parmi les meilleures joueuses françaises de poker à l'heure actuelle.
Mais qui est donc notre Française qui a animé (pour ne pas dire égayé) ce Main Event 2012 pour nous autres Français ? Pour ceux qui l'ont découverte à l'occasion de ces World Series (et même pour les autres), voici le parcours de la nouvelle tête d'affiche du poker tricolore.
Née le 26 avril 1983 à Strasbourg, Gaëlle part suivre des études d'anglais à Perth, en Australie. En 2007, alors qu'elle a tout juste 24 ans, elle est initiée au poker par des amis. Et cette première partie est une véritable découverte ! Guidée par la chance du débutant, elle rafle la mise "J'ai rasé la table !" et décide de poursuivre l’aventure sur le Net.
Elle prend alors pour la première fois le risque de miser 100 €, une somme considérable pour cette jeune étudiante. Gaëlle reste cependant lucide, s'engage à tout arrêter si jamais elle perd son argent.
Heureusement, cela n'arrivera pas !
Parallèlement à son "grind", elle joue tous les samedis pendant une année dans son club de poker parisien attitré, la Darshan Team 75 dans le 17ème arrondissement, où elle rencontre les premières personnes qui la feront progresser.
Gaëlle continue à miser assez petit pour s'exercer dans des sit & go et des tournois multi-tables.
2009, la belle année
Dans le même temps, en 2008, elle devient titulaire d'un diplôme de traductrice qui lui assure un certain avenir. Mais sa carrière sera toute autre grâce à l'intervention de l'un de ses amis, qui lui conseille de participer à de plus gros tournois sur Pokerstars, ceux à 180 joueurs... et pour son premier, c'est elle qui remporte le premier prix de 1500 $ !
La même année on aura également pu l’apercevoir du côté du RTL9 Poker Tour, mais faute de jeu elle n’aura pu y briller.
Mais lassée des petits enjeux, et forte de ce sucès naissant, Gaëlle veut ensuite monter trop vite. Et en quelques jours à peine, elle a déjà tout reperdu.
Ce bad-beat est en réalité une formidable chance puisque c'est ce qui la pousse à sérieusement se mettre aux parties d'argent en 2009, notamment en heads-up. Grâce notamment à des premières sessions de coaching (en échange d’un pourcentage de ses gains), elle empochera près de 7000 $ en moins de 6 mois !
2009 est décidément une bien belle année poker pour Gaëlle, qui y remportera aussi la manche strasbourgeoise du France Poker Tour.
Des Limpers à Winamax
Depuis, Gaëlle ne s'arrête plus de jouer. En 2010, à 27 ans, sa victoire au challenge Limpers lui permet de gagner 6 mois de coaching auprès de certains cracks du cash game français tels que Cyril André, Alexandre Luneau et Nicolas Ragot. Cette expérience lui est profitable : elle corrige ses défauts et son jeu se perfectionne.
Cette même année elle dispute ses premiers WSOP, en participant au tournoi Ladies.
Très vite, elle intègre également les « Local Hero » chez Winamax, statut sous lequel elle gagne le Freeroll VIP Super Diamond en juin 2011 (gains : 2800 €), et réussit une deuxième place au XTASE 100 € en septembre (gains : 2 931 €). Entre-temps, le 28 avril 2011, elle se hisse également à la 14ème place du Chilipoker Deepstack Open de Cannes (gain : 3000 €).
En 2012, elle intègre officiellement la Team Pro de Winamax, où elle joue sous son pseudo « O RLY ».
Et la seule représentante féminine de l'équipe montre qu'elle est coriace. Elle se fait remarquer lors des Winamax Series d'avril 2012 (8ème de l'Event #15 pour 2 264 € de gains) et termine à une honorable 75ème place lors du Grand Final de l'EPT Monte-Carlo (gains : 15 000 €).
De Malte à Vegas
Gaëlle part alors s'installer sur l'île de Malte avec Julien Ehrhardt (26ème place à l'EPT de Deauville en janvier 2012). Mais si son terrain de prédilection reste les tables online, elle veut aussi continuer à progresser en live.
Elle tente alors l'aventure des 43ème WSOP cet été à Las Vegas.
Raisonnable, elle ne programme que trois tournois. Dans le premier, l'Event #46 de No Limit Hold-em à 2500$, elle se classe 123ème pour 5 265$ de gains. Dans le deuxième, l'Event #51 des Ladies, elle se classe cette fois 15ème, pour 7 716 $ de gains.
Mais l'ascension de Gaëlle va être encore plus fulgurante et spectaculaire ! Pour son troisième tournoi, le Main Event, elle est encore en course et même très bien placée (8ème) au Jour 6 (après avoir été chip leader lors du Day 2, elle n'aura même jamais quitté le Top 20).
Une renommée désormais internationale
Sa renommée devient internationale et largement médiatisée puisqu'elle parvient naturellement au Day 7, synonyme de dernière ligne droite avant la table finale d'octobre.
10ème et avec le plus petit tapis, un ultime tapis lui est cependant fatal, et elle manque d'un rien de se glisser dans les "October Nine".
Mais même si elle ne fait pas partie de ces 9 finalistes, la tricolore n'a pas à rougir de son parcours : avec cette 10ème place et ses 590 442 $ de gains, elle signe le meilleur résultat français au Main Event depuis trois ans (en 2009, Antoine Saout avait terminé 3ème).
Depuis le départ d’Almira Skripchenko et d'Alexia Portal, Gälle est désormais la seule fille de la Team Winamax, une fierté mais aussi un peu de pression selon ses mots, elle qui souhaite continuer de prouver que les femmes sont aussi bonnes que les hommes au poker.
Coriace, têtue, passionnée, travailleuse... Gaëlle Baumann a assurément toutes les qualités requises pour s'inscrire pour de bon dans le top panel des joueurs français. Et la seule question qui semble désormais se poser est plutôt de quand aura lieu son prochain gros résultat.
► A lire aussi : Le Questionnaire de Proust de Gaëlle Baumann
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Gaëlle Baumann : « Les hommes qui participent aux Ladies Event n'ont rien compris »
(05/02/15 - par Christian Henkel)
Le récurrent débat autour des Ladies Event a refait surface cette semaine à Deauville.
22 hommes auront en effet pris part au "tournoi des filles" de l'EPT Deauville, avec 7 d'entre eux encore là parmi les 14 "joueuses" encore en course. Et c'est même l'un d'entre eux qui s'est imposé.
Sabina Hiatullah, deuxième, aura reçu le trophée - et bien que regrettant la situation se sera même amusée du faible niveau de pas mal des intrus - , mais la situation aura naturellement laissé un goût amer à la plupart des observateurs.
L'un de ceux-ci ? Nulle autre que Gaëlle Baumann, l'une des quelques femmes du poker qui a réussi à faire oublier les débats sur le genre en se focalisant principalement sur son jeu.
PokerListings a rencontré la joueuse Winamax à l'occasion de cet EPT Deauville, pour recueillir son opinion sur l'importance de ces Ladies Events, mais aussi bien sûr sa prochaine maternité et son futur en tant que joueuse de poker professionnelle.
Vingt hommes ont donc participé au Ladies Event de l'EPT Deauville. Qu'en penses-tu ?
Les hommes qui insistent pour participer aux tournois féminins sous prétexte que la loi les y autorise n'ont rien compris à ce type de tournoi.
Ces tournois ont une fonction marketing, ils sont utiles au poker live et au poker en général. Et puis de toutes façons, dans la majorité des tournois, 95% des joueurs sont des hommes.
Le Ladies Event est là pour permettre aux femmes qui n'osent pas participer aux autres tournois de jouer. C'est fait pour les inciter à jouer. Peut-être que le fait de jouer dans un environnement protégé leur permettra d'acquérir la confiance nécessaire pour se lancer dans un autre tournoi du circuit EPT.
Honnêtement, être la seule femme autour de la table peut être très intimidant. Je me souviens quand j'ai commencé à jouer dans des clubs à Paris, la plupart du temps j'étais très intimidée au milieu de tous ces mecs.
Tu as déclaré que l'Australie était ton pays préféré. Pourquoi es-tu ici et pas à l'Aussie Millions ?
(rires) Comme tu peux le voir, je suis enceinte de 5 mois. J'aime beaucoup l'Australie parce que j'y ai vécu quand j'étais plus jeune.
Mais j'aime aussi beaucoup Deauville, c'est très proche de Londres.
Tu vis à Londres ?
Oui, je vis entre Londres et Malte.
Et tu aimes Deauville en février ? C'est quand même un peu gris, froid et venteux, non ?
C'est sûr que ce serait plus agréable si le tournoi avait lieu en plein été.
Mais c'est mieux que de ne pas avoir d'étape française sur l'EPT. Et puis il y a beaucoup d'argent à récupérer ici, avec tous les amateurs parisiens qui font le voyage... On les aime beaucoup ici ! (rires)
Comme tu vis à l'étranger, est-ce que tu peux jouer sur les sites français ?
Depuis Malte, oui. Depuis Londres, non. C'est pour ça que je fais beaucoup d'allers-retours, pour pouvoir faire des tournois sur Winamax.
Il y a de moins en moins de fréquentation pour le poker en ligne en France, à cause des taxes et impôts. Où en est-on vraiment aujourd'hui ?
Beaucoup de joueurs français sont en mauvaise position vis à vis des impôts. Mais la législation n'est pas claire.
La conséquence, c'est que les joueurs ne sont plus sûrs de rien. Le principal problème, c'est qu'ils veulent imposer les gains sur les cinq dernières années. Le taux d'imposition est entre 35% et 40%. C'est beaucoup. Mais surtout, certains joueurs n'ont même plus leurs gains.
Quel est ton statut actuel en tant que joueuse professionnelle ?
Je vis avec mon copain et nous allons avoir un enfant. J'espère quand même pouvoir recommencer à jouer sur le circuit live dès que mon bébé aura un peu grandi, je n'ai pas l'intention de prendre ma retraite ! (rires) Je pense que ça sera possible, du moment qu'on s'organise correctement.
Je n'ai pas vraiment de modèle sur le circuit. Peut-être Claire Renaut, la femme de Fabrice Soulier. Elle ne participe pas aux tournois très chers, mais elle emmène son bébé avec elle sur le circuit lorsqu'elle accompagne son mari.
Tu as un jour confié vouloir étudier l'astrophysique. C'est toujours un projet ?
Non, mes projets n'ont rien à voir avec l'astrophysique. Ce rêve est terminé. (rires) Je suis une joueuse professionnelle, on verra si j'ai d'autres objectifs dans le futur.
Penses-tu qu'une femme doive avoir des caractéristiques masculines pour survivre sur le circuit ?
J'ai toujours dit que je pensais avoir plus de côtés masculins que féminins. Évidemment, c'est un peu cliché, mais il y a quand même beaucoup de différences au niveau du style de jeu dans les Ladies Events.
Mais je tiens quand même à dire que je me considère comme un joueur, pas un homme ou une femme.
Dernière question : ta rencontre avec Andras Koroknai au Main Event des WSOP 2012, tu en fais encore des cauchemars ?
En fait, je n'y pensais plus du tout jusqu'à ce que je joue contre lui à Prague il y a quelques semaines. Dès que j'ai joué une main contre lui, tous ces mauvais souvenirs sont remontés. (rires) J'imagine que c'est toujours là, dans mon subconscient. (rires)