Ancienne championne olympique de hockey sur gazon avec les Pays-Bas, Fatima Moreira de Melo reste une figure sportive importante dans son pays. Vous vous doutez donc qu’elle a été particulièrement occupée ces dernières semaines.
Mais après s’être entièrement consacrée aux Jeux olympiques pendant un peu plus de deux semaines, de Melo est désormais bien de retour dans le poker à l’occasion de l’EPT Barcelone.
Qu’a-t-elle pensé de ces 16 jours passés à Rio de Janeiro ? Quel est son avis sur le dopage, dans le sport et dans le poker ?
Nous lui avons posé la question.
Fatima de Melo : J’ai eu quelques semaines très intenses. J’analysais les matchs de l’équipe féminine des Pays-Bas pour une chaîne télé et toutes les infos olympiques sur une autre.
Autant dire que j’ai tout regardé.
On dit souvent que le poker a énormément évolué ces dix dernières années. Est-ce que c’est la même chose pour le hockey sur gazon ?
Tout à fait. Déjà à mon époque, le hors-jeu avait disparu. Aujourd’hui, plein de nouvelles règles ont accéléré le jeu.
Par exemple, il est possible de se faire une passe à soi-même sur l’équivalent d’une touche, il n’y a plus de prolongation, les deux mi-temps de 35 minutes sont devenues des quarts-temps de 15 minutes, et les penaltys ont été remplacés par des attaques, ce qui est incroyable au niveau de l’intensité.
Il y a beaucoup d’autres exemples.
En tant que professionnelle, est-ce que tu étais toujours au courant de tous les compléments alimentaires et médicaments que tu prenais ? Est-ce que c’est possible de se doper sans le savoir ?
Je n’ai jamais pris grand-chose, si ce n’est des vitamines. Et si je prenais quoi que ce soit, je m’assurais toujours que c’était approuvé par le Comité olympique.
Et si ton coach t’avait donné des pilules en te disant que c’était des vitamines ?
Impossible. Après, ton coach peut obtenir des médicaments via le Comité olympique, mais à un moment il faut faire confiance à quelqu’un.
Aux Pays-Bas, le Comité olympique n’encourage absolument pas le dopage. On nous a toujours dit de ne rien prendre, même les médicaments sans ordonnance, même avec une ordonnance, avant d’en avoir parlé au docteur de l’équipe.
Donc les sportifs ont le contrôle. Ils savent ce qu’ils prennent.
Aux Pays-Bas en tout cas. Dans les autres pays, je n’en sais rien. Je ne sais pas comment fonctionnent les choses en Russie, par exemple.
Je ne sais pas à quelle pression sont soumis les sportifs dans certains pays, ou à quel point certains sont encouragés à se doper parce que c’est leur seul moyen de sortir de la pauvreté.
Aux Pays-Bas, on a beaucoup d’opportunités, et donc moins de chances de tomber du mauvais côté.
Est-ce que le CIO a pris la bonne décision concernant les athlètes russes, selon toi ?
C’est une question complexe. Les athlètes sont des personnes. Même ceux qui se dopent s’entraînent très dur. C’est impossible de disqualifier tous les athlètes russes, ce qu’ils n’ont pas fait d’ailleurs, parce que tout le monde ne se dope pas.
À l’inverse, certains athlètes déjà condamnés pour dopage ont pu aller aux JO, comme la nageuse [Yulia Efimova, ndlr], ce que je trouve assez étrange.
Et puis il y a des pays comme le Kenya dont on ne connaît pas du tout le système de contrôle. Et enfin les athlètes qui se dopaient mais ne se dopent plus.
La conclusion, c’est que des athlètes russes ont pu être bannis sans avoir participé au système de dopage.
Ce système a été confirmé.
Oui. Et dans ce cas-là, je pense que chaque athlète doit subir des tests approfondis, payés par le gouvernement russe.
Je pense que tout le monde a droit à une chance, mais c’est ma vision des choses. De toute façon, au hockey le dopage n’apporte pas grand-chose. Tu peux gagner en condition physique, mais les inconvénients sont bien plus importants que les avantages.
Dans un tournoi de poker, est-ce que vous voleriez un jeton de 25, alors que vous avez un stack de 30 000 et que vous risquez la disqualification ?
Le risque est disproportionné. Si ce n’est pas une question morale, l’évaluation des risques doit faire pencher la balance.
Il y a dopage et dopage.
Il y a aussi des cas comme celui de Maria Sharapova par exemple. Elle prend du meldonium depuis 10 ans. Il a été ajouté à la liste des substances interdites, et trois semaines plus tard elle a été suspendue deux ans.
Trois semaines de dopage, perçues comme 10 ans. La perception est cruciale ici. Et le meldonium n’est pas nocif.
Est-ce que ça doit vraiment être sur la liste ? Il faut faire attention à ne pas aller trop loin. Si une substance est disponible et non nocive, la décision doit vous appartenir d’en prendre ou pas.
Penses-tu que le poker devrait être contrôlé ? Il y a forcément des joueurs qui prennent des substances, légales ou illégales.
Pas du tout. Les gens prennent des trucs, mais je m’en fiche. C’est leur choix.
Est-ce que tu penses que ces substances peuvent leur donner un avantage ?
Probablement.
Mais c’est injuste, non ?
Non, puisque tu peux faire la même chose. N’importe qui peut se renseigner sur ce qui peut l’aider à se concentrer. Personnellement, je ne prends rien, mais je suis assez libérale.
Je ne fume pas, je ne bois pas, je ne prends pas de drogues. Mais je ne juge pas les gens sur ce qu’ils font et la manière dont ils se préparent.
Pour moi, c’est important de laisser les gens vivre comme ils l’entendent.