Qu'est-ce que ça fait d'être le meilleur joueur de l'histoire de son pays ? Le Libanais Nicolas Chouity a peut-être la réponse.
Membre d'un petit – mais excellent – groupe de joueurs libanais, Chouity est surtout connu pour sa victoire lors de l'EPT Grand Final 2010 à Monte-Carlo. Mais il multiplie aussi les bonnes performance dans le monde entier. Dernier exemple en date, sa 3è place au WPT Chypre pour 140 000 $.
PokerListings l'a récemment rencontré du côté de Londres, où il a encore une fois atteint une belle place payée lors du High Roller de l'EPT à 10 000 $.
L'Allemand Dominik Nitsche est arrivé à Londres directement depuis Beyrouth. Apparemment, il a joué quelques tournois là-bas, mais refuse d'en parler pour ne pas que ça s'ébruite. C'est un secret ?
(rires) Ça ne m'étonne pas. Jusqu'à il y a trois ans, lorsque les choses ont commencé à dégénérer au Moyen-Orient, Beyrouth était une destination en pleine explosion pour le poker et les casinos.
Maintenant, la plupart des casinos ont fermé parce qu'il n'y a presque plus de touristes. Il ne reste qu'un seul casino, géré par l'Etat.
Il y avait récemment un tournoi à 5 000 $. Il devait y avoir entre 150 et 160 joueurs, d'un niveau assez modeste.
Quel genre de joueurs étaient présents ?
Surtout des Russes et des joueurs locaux.
Quid des cash games ?
Ils sont un peu moins bien organisés... mais très rentables. (rires)
Est-ce qu'il y a une tradition du jeu à Beyrouth ?
Oui. La moitié des Libanais sont chrétiens, ce qui fait du Liban un pays un peu à part au Moyen-Orient.
Ce qui est intéressant, c'est que les chrétiens du Liban aiment jouer officiellement, et que les musulmans aiment jouer en secret.
Mais globalement : les Libanais aiment jouer.
On retrouve un certain nombre de joueurs libanais sur le circuit international, souvent avec de bons résultats. Tu es le meilleur joueur libanais avec 3 millions de dollars de gains en tournois. Le poker est-il véritablement populaire au Liban ?
Il faut savoir que la plupart des joueurs libanais qu'on retrouve sur le circuit sont des hommes d'affaires. Ils ne veulent pas que leur passion du poker soit connue du public, c'est comme ça au Liban.
Le poker est assez respecté, mais plus pour l'aspect jeu d'argent que pour le côté mathématique. Nous sommes très peu de joueurs professionnels, et personne ne nous connaît en dehors du monde du poker.
Le Liban a une autre particularité : il y a autant de Libanais à l'étranger qu'au Liban. Il y a donc des chances que les joueurs libanais que vous voyez aux tournois ne vivent même pas au Liban, voire n'y soient même pas nés.
A ton avis, est-ce que les Libanais ont un style de jeu particulier ?
Oui, et c'est facile à expliquer. Soit ils jouent trop serré, soit trop agressif. Il n'y a pas de juste milieu.
Dirais-tu qu'il y a une véritable communauté de joueurs libanais qui voyagent ensemble et échangent beaucoup ?
J'ai quelques amis proches dans le poker, comme Jeff Hakim et Eddy Maksoud, mais nous ne passons pas tout notre temps ensemble.
Le poker en ligne est-il légal au Liban ?
Tout à fait.
Parlons un peu de toi. Tu as fait des études ?
Je viens d'une famille libanaise moyenne et j'ai fait des études de finance et d'économie.
Comment vois-tu le futur ?
Je me demande de plus en plus si j'ai vraiment envie de continuer ma carrière de joueur professionnel. C'est vraiment stressant. Malheureusement, la situation du poker s'est détériorée depuis le Black Friday. Je ne m'amuse que quand je suis heureux et qu'il n'y a pas de tension à table.
Tu as une reconversion en tête ?
En dehors du jeu, les Libanais sont très doués en trading. (rires) Plus sérieusement, j'aimerais créer ma propre entreprise et continuer à jouer au poker de manière récréative.