On l’a déjà dit souvent, mais on le répétera jamais assez : Chris Moorman a remporté plus de 13 millions de dollars en poker en ligne.
Classé n°1 mondial à plusieurs reprises, il a remporté la « Triple couronne » online plus de 30 fois, ce qui signifie remporter trois grands tournois en ligne dans la même semaine.
Par ailleurs, il s’est imposé sur le World Poker Tour (LAPC 2014 où Patrick Bruel avait terminé 4è) et compte plusieurs tables finales aux WSOP.
Pour résumer : Chris Moorman domine le poker depuis des années. Et il a enfin décidé de nous confier son histoire et quelques-uns de ses secrets.
Recrue vedette de la Team 888poker l’année dernière, Moorman présentait il y a quelques jours sont deuxième livre à l’occasion du festival 888poker à Londres. Nous l’y avons rencontré.
Chris, est-ce que tu peux nous parler un peu de ton dernier livre ?
Il se compose de deux parties distinctes. La première est ma biographie. Je raconte comment je me suis lancé dans le poker, comment j’ai progressé, etc.
Ensuite, on enchaîne sur ce que représente le fait d’aller loin dans des gros tournois et comment je me suis mis à investir dans des joueurs. Vous ne le savez peut-être pas, mais à un moment je me suis retrouvé avec 30 joueurs dans lesquels j’avais investi dans des tournois high stakes.
Au moment du Main Event des WSOP, j’avais déjà investi 250 000 $.
C’est des histoires de fou, d’habitude je n’en parle qu’à mes amis quand je suis bourré. Je n’en ai jamais parlé en interview jusqu’ici.
Tu avais investi 250 000 $ dans des joueurs rien qu’au Main Event ?
Oui, j’avais des parts chez 25 joueurs. Aucun n’est allé jusqu’en table finale.
Passons à la deuxième partie du livre.
La deuxième partie est plutôt centrée sur la stratégie. Contrairement à mon premier livre, dans lequel j’analysais les mains des autres, là je parle des miennes.
Il s’agit de mains pendant des gros tournois. J’explique ce que j’ai fait et pourquoi je l’ai fait, le contexte et l’importance de mon adversaire.
J’explique aussi comment le jeu a évolué en comparant une main que j’ai jouée il y a quatre ou cinq ans et comment je la jouerais aujourd’hui.
Tu as terminé deuxième du Main Event des WSOPE à Cannes il y a quelques années, derrière Elio Fox.
Très bon exemple. Il y a évidemment quelques mains de cette table finale. J’explique ce que j’ai fait et comment je ferais les choses aujourd’hui.
Pendant quelques années, le marché était saturé de livres de poker. Dont certains n’ont probablement été écrits que pour l’argent. À ton avis, qu’est-ce que tu apportes de nouveau ?
Ma principale source de motivation, ce sont les choses qu’on m’a dites à propos de mon premier livre. Beaucoup de joueurs sont venus me voir pour me dire qu’ils connaissaient mal mon jeu avant cela et qu’ils avaient aimé le livre.
Certains m’ont même transmis les bons résultats qu’ils ont obtenus après avoir lu mon livre. C’est vraiment gratifiant, parce que j’avais mis beaucoup de temps à écrire ce livre.
Les gens m’ont dit qu’ils voulaient voir mes propres mains, mon jeu. Alors j’ai voulu aller plus loin.
Ils voulaient aussi apprendre à mieux me connaître. Ça explique la structure de base du livre.
Tous les joueurs qui écrivent et/ou coachent font face au même dilemme : comment partager leurs secrets sans tout révéler ?
Le poker est tellement ancré dans son contexte que même si je dévoile tout sur une situation spécifique, celle-ci ne se reproduira jamais.
Il n’y aucune règle systématique du genre « si j’ai cette main, je fais toujours ça ». Donc cela ne peut pas me désavantager.
Je donne simplement des outils que les gens doivent ensuite mettre en pratique.
On a l’impression que beaucoup de joueurs font un « burn-out », même jeunes. Tu sembles y avoir échappé.
Je suis un mec normal. Parfois j’en ai marre, comme tout le monde. Avant, je jouais nuit et jour, je ne m’arrêtais jamais. Maintenant, si je joue deux nuits d’affilée, j’ai besoin de me reposer ensuite.
Je ne pensais pas que cela m’arriverait un jour, et pourtant. Parfois j’en ai marre, mais ma passion pour le poker est toujours là.
Mais j’ai aussi d’autres priorités. Avant, il n’y avait que le poker, mais ça a changé. Ma vie ne se résume plus au poker.
C’est beaucoup plus sympa, et j’ai moins de pression. Ça aide, surtout dans les gros tournois. Avant, seul l’argent comptait, je ne parlais à personne.
Le poker est-il en évolution permanente ? Est-ce que la stratégie actuelle sera toujours valable dans cinq ans.
Je n’en sais rien. Au plus haut niveau, les joueurs ont accès à tellement de ressources qu’ils connaissent très très bien leur jeu.
Avant, même les stars prenaient quelques décisions au hasard par moments, mais maintenant tout est calculé.
Ne serait-ce qu’il y a quatre ou cinq ans, tu pouvais progresser juste en jouant et en prenant de l’expérience. Aujourd’hui, il faut bosser en dehors.
C’est presque comme faire ses devoirs. Tu t’entraînes à la maison le plus possible pour être fin prêt en tournoi.
Est-ce que cela veut dire qu’un jour le poker sera « résolu » ?
Peut-être en cash game. La structure est rigide et tout le monde à 100 grosses blinds. En tournoi, c’est très différent.
Je pense que les tournois resteront toujours intéressants parce qu’ils sont forcément uniques.
Le dernier livre de Chris Moorman, Moorman, sortira juste avant les WSOP 2017 chez D&B Publishers.